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Publié : 14 février 2021

GPSeO

Grand Paris Seine & Oise : la fin de la fronde des sept communes ?

Le jeudi 11 février 2021 devrait rentrer dans les annales de l’histoire locale si l’on en croit M. Raphaël Cognet, maire de Mantes-la-Jolie et président, depuis 2020, de la Communauté urbaine Grand Paris Seine&Oise suite à la conclusion de la négociation qui fera l’objet d’une validation par les assemblées des 73 communes d’une part et qui a été adoptée lors de la réunion du conseil communautaire de ce même jour marquant pour l’avenir de l’intercommunalité.

Trois ans de procédure et cinq de méfiance

Il est loin le temps où Pascal Collado, maire de Vernouillet gesticulait avec un jusqu’au-boutisme « On ira jusqu’au but pour faire valoir nos droits » (27 mai 2019) suite au jugement favorable du Tribunal administratif de Versailles du 23 mai 2019. Cette décision de justice avait annulé le «  protocole financier général », ainsi, donné raison aux sept communes frondeuses.(1) Désormais, M. Collado cherche l’apaisement et le consensus pour trouver une sortie de cette impasse politique et juridique qui dure depuis 2017 : la neutralité fiscale n’avait pas été acceptée par ces communes frondeuses de l’ancienne Communauté d’agglomération des 2 Rives de Seine et surtout elles ne voulaient pas se « faire avoir » par une utilisation dévoyée du principe de solidarité territoriale. Elles exigèrent l’égalité de citoyens devant l’impôt ; elles avaient gagné largement sur un point technique : le tribunal administratif avait confirmé, après trois ans de procédure, que le pacte fiscal de 2016, n’était pas conforme à la limitation prévue par le code générale des impôts en cas d fusion d’EPCI (+ ou – 15 % avant fusion). Ce conflit a pourri le fonctionnement de la communauté urbaine et a fragilisé la base financière de Grand Paris Seine & Oise. Pour couronner le tout, l’ancien président, Philippe Tautou avait pêché par orgueil en ne voulant pas négocier(2) avant la fin de son mandant. Quel gâchis !

Raphaël Cognet, président de GPS&O depuis 2020, s’est fixé comme mission prioritaire de «  mettre à terme ce litige qui pourrissait la vie de GPS&O » tout en affaiblissant ses fondations juridiques et politiques. Pour lui, le texte fondateur, le pacte fiscal, a dû être relancé par une médiation d’un cabinet d’avocat spécialisé en raison de la complexité du dossier. Réaliste, M. Cognet a souligné que « si l’on n’est pas d’accord sur ces deux points (juridique et politique), on ne pourrait pas avancer...  » Le président actuel est lucide et avoue non seulement la fragilité de la genèse de cette intercommunalité, mais l’impuissance de l’ancien président de l’exécutif sur ce dossier capital pour l’avenir de la communauté urbaine.

Rétablir les liens

Rétablir les liens entre les sept communes frondeuses et le nouveau exécutif est désormais primordial. Ainsi, lors de la réunion du conseil municipal d’Andrésy, le 10 février 2021, Pascal Collado a défendu le protocole transactionnel qui sort par le haut de ce conflit. Le maire d’Andrésy, Lionel Wastl, l’avait invité à discourir sur ce sujet fort délicat. Certes, le protocole pourrait être retoqué par le juge administratif lors de la phase dite « d’homologation » d’une situation qui avait été jugée illégale (en 2019). C’est le risque qui l’on prend en 2021. C’est une sorte de mal nécessaire pour avancer. Au contraire, dans un esprit légaliste, M. Denis Faist, ancien conseiller communautaire (2014−2020) a rétorqué que « quelque soit l’issue de débats, le pacte fiscal avait été jugé illégal  » ; il continue à penser que l’on ne défend pas l’intérêt de nos concitoyens car « on va payer ad vitam æternam » plus que les 31 communes non impactées par ce premier pacte fiscal : par exemple, Poissy, Achères, Conflans, Aubergenville… vont même bénéficier à vie de cet accord négocié en 2021. M. Faist, le puriste, défends la ligne dure pour aller jusqu’au but du jugement en appel. D’ailleurs, il ne s’interdit pas de poursuivre ce combat juridique en tant que contribuable andrésien.

« Non, il faut descendre d’un cran » a plaidé M. Cognet pour sortir par le haut. Il est habile de négocier même si l’on prend son temps. En effet, trente et une communes ne sont impactées ; douze communes dont les sept frondeuses vont bénéficier « de ristournes », ce qui équivaudrait à 11,8 millions d’euros ; en revanche, 30 communes dans sa majorité rurales seront obligées de verser au pot commun environ 3,4 millions d’euros par an. Pour M. Cognet, «  les élus sont les responsables et porteurs de l’intérêt général  » qui s’annonce par l’arrivée d’EOLE, par la poursuite du développement économique et la mise en place d’une « écologie populaire  ».

Pourquoi a‑t-on tant tardé ?

Il y aura effectivement des arrangements pour lisser ces paiements… mais le coût annuel, pour la CU, s’élève à 8,8 millions par an. Le coût financier est énorme et cela met en péril les finances de la communauté urbaine. Par voie de conséquent, cet effet s’ajoute au coût politique de cette mauvaise manœuvre de 2016, prise par un exécutif naïve et non préparée à la construction d’un territoire énorme avec ses projets et défis inimaginables.

Le 11 février 2021, le conseil communautaire a adopté le protocole transactionnel afin de finir avec cette fronde et les sept communes devraient, par la suite, renoncer au contentieux. Après un vote majoritaire dans 73 assemblées des communes, l’homologation du juge administratif achèvera cette négociation inédite dans les annales du fait intercommunalité depuis des lustres.

Il est indispensable de tourner la page car les 73 communes ont besoin d’être dans un atmosphère de confiance et non pas d’animosité constante. Cela favorisera la mise en œuvre des projets intercommunaux et les politiques publiques dans les domaines et compétences de la CU.

Pourquoi a‑t-on tant tardé ? Aucun(e) élu(e) ne fait son introspection quelque soit la partie impliquée dans ce dossier de fronde fiscale ; les fondateurs de la CU sont toujours là aux manettes mais ils avancent masqués (COVID oblige). Cela interroge sur les décideurs (anciens et présents) qui avaient «  vanté les avantages dont les économies d’échelle et les subventions pour se constituer en bloc intercommunal XL ». Certains dont le président actuel devraient faire un séminaire « retour  » sur les méfaits des intercommunalités XL.


Six de sept maires de la « fronde fiscale » de 2017 à 2020 lors de la conférence de presse du 27 mai 2019 à Orgeval. Certains élus ont passé la main. (Photo J2R)

Post-scriptum

Notes

1, Andrésy, Chapet, Médan, Orgeval, Vernouillet, Triel-sur-Seine et Villennes-sur-Seine.

2. Contrairement à ce qu’il avait affirmé, dans une interview au J2R en 2019, que GPS&O n’allait pas fait appel afin de trouver une solution convenable pour toutes les parties. Que de paroles dans l’air !