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Publié : 27 octobre 2023

Immobilier

Observatoire Régional du Foncier en Île-de-France : La chaîne du foncier public grippée mais pas bloquée par la crise immobilière

L’Observatoire régional du foncier a organisé le 24 octobre 2023 à la préfecture de Paris et d’Île-de-France une rencontre sur le suivi des marchés fonciers franciliens, ainsi qu’une table ronde intitulée « 2023, baisse des volumes et des valeurs : quelles conséquences sur le foncier et ses acteurs ? ».

Le marché foncier global de la dernière décennie

Sur la période 2019–2021, le marché foncier global représente 44 Mrds € par an pour un nombre de transactions élevé, près de 65 000 ventes. Cette période constitue un plateau très élevé au regard de la décennie précédente (hausse de 50 % des volumes financiers par rapport à la période 2010–2012 et de 17 % par rapport à 2016–2018).

Un ralentissement de l’activité autour des gares est à noter, la progression n’est que de 6% par rapport à 2016–2018 contre +36 % entre 2013–2015 et 2016–2018.

La Seine-Saint-Denis reste le département de la petite couronne le plus actif quant au nombre de transactions et aux surfaces échangées, tandis que les Hauts-de-Seine affichent les valeurs les plus élevées. La grande couronne représente près la moitié du marché en termes de valeur et près de 80 % en termes de nombre de ventes. Et la Seine-et-Marne reste le poids lourd du marché en grande couronne avec en moyenne annuelle 18 000 mutations et 6 400 ha échangés (respectivement 35 % et 45 % du total de cette zone) sur 2019- 2021.

Enfin, Paris reste un marché atypique, générant un volume financier très élevé, équivalent à celui des Hauts-de- Seine (7,7 Mrds €), mais pour un nombre de transactions bien moindre (570 en moyenne contre 3 250).

La consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers (ENAF)

La consommation brute d’ENAF s’établit à 761 ha en 2021 en Île-de-France et s’inscrit dans une trajectoire en baisse au cours des cinq dernières années : ‑28 % entre 2017 et 2021 avec une moyenne de consommation de 925 ha/an, à 46 % pour l’activité et 38 % pour l’habitat.

Le marché des « fonciers à urbaniser » en Île-de-France

Les «  fonciers à urbaniser  » (FAU) sont une nouvelle catégorie retenue par l’ORF pour caractériser les mutations de terrains, nus ou bâtis destinés à accueillir de la production urbaine. C’est une avancée méthodologique pour mieux cerner le processus de chaîne du foncier.
Ils représentent 8,3 Mds€ sur 2018–2020, soit 20 % des valeurs du marché foncier global et le quart des surfaces échangées (26%). Cela signifie 8 900 mutations par an de[sb2] toute nature. Au sein de ce marché des fonciers à urbaniser, le segment des fonciers déjà bâtis inclut les parcelles comportant des maisons individuelles, immeubles, ou locaux d’activités achetées pour être aménagées, densifiées, ou démolies et reconstruites.

Ce foncier bâti représente en surface une faible part du marché soit 825 hectares (21 %) par an sur la période, mais une forte part en valeur : 5,2 Mds€ (62 %).
L’essentiel du marché des fonciers à urbaniser fait donc intervenir des professionnels de la production urbaine, qui sont au centre de la «  chaîne du foncier  » à urbaniser avec 86 % des achats et 69 % des ventes en valeur. Ainsi le segment des ventes de particuliers à particuliers ne représente que 7% de la valeur des mutations. Sur le plan géographique, le marché francilien des fonciers à urbaniser affiche une très forte concentration spatiale.
Sur la période 2018–2020, la petite couronne concentre 21 % des mutations annuelles mais presque la moitié des valeurs (45 % soit 3,7 Mds€). Paris représente de son côté 1 % des mutations et 21 % des valeurs et la grande couronne regroupe 78 % des mutations et 35 % des valeurs échangées sur ce marché.

Focus sur les bailleurs sociaux

Les acquisitions de fonciers à urbaniser (FAU) par les organismes de logements sociaux en Île-de-France représentent environ 2 % du marché global des FAU en surface et 8 % en valeur. La géographie des acquisitions par les bailleurs sociaux se concentre dans le cœur de la région, bien que moins concentré que pour l’ensemble du marché des FAU avec une forte activité en petite couronne mais aussi dans des intercommunalités de grande couronne, comme la communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise ou la communauté de communes du Vexin-Val de Seine. La part représentée par les bailleurs sociaux a reculé au profit des promoteurs immobiliers. Un effet de vases communicants qui renvoie notamment au fort développement de la Vefa HLM.

La table ronde intitulée « 2023, baisse des volumes et des valeurs : quelles conséquences sur le foncier et ses acteurs ? » s’est tenue ensuite, avec la participation de Sabine Baïetto-Beysson, présidente de l’ORF, Gilles Bouvelot, directeur général de l’EPFIF, Aude Debreil, présidente du directoire Grand Paris Habitat, Laurent Girometti, directeur général EpaMarne EpaFrance, Maître Xavier Lièvre, notaire, chambre des notaires de Paris. La table ronde était animée par Rémi Cambau.

Entre ralentissement et ajustements du marché

La crise de l’immobilier de logement ralentit l’activité des aménageurs et des établissements publics fonciers, expliquent Gilles Bouvelot, Laurent Girometti, Aude Debreil et Maître Xavier Lièvre, mais l’ajustement du marché est en cours, cependant que la production et la commercialisation de logements se poursuivent dans les secteurs détendus. Dans les opérations nouées avec des établissements publics, fonciers ou d’aménagement, cet ajustement se fait, de l’aveu des responsables, par le délai, la dégradation de la qualité ou la part de vente en bloc… C’est aussi vrai dans le diffus, où les obligations de qualité sont moins fortes, et où, parfois, les opérateurs peuvent renégocier les prix du foncier avec des vendeurs privés. Il y aura peut-être « un début de décoinçage » fin 2024, mais «  on ne rattrape pas si vite un écart de 25% avec le marché ».

Le constat unanime d’un grippage du marché

La machine est grippée avec des prix des logements trop élevés, des taux qui ont augmenté brutalement et une forte progression en 2022 des coûts des matériaux de construction. La production de logements est en forte baisse. On note moins 40%, sur un an, de réservation de particuliers sur des logements neufs. « Le marché est déstabilisé par les taux d’intérêt. Fin juillet, le chiffre d’affaires des notaires en Île-de-France a reculé de 20% et depuis septembre la situation a empiré  » explique Maître Xavier Lièvre. « Les opérations longues avec travaux actuellement ne trouvent pas preneurs », souligne Laurent Girometti qui malgré la situation de crise, ne connaît pas de promoteurs qui se soient désistés d’une opération, mais des demandes de changement de programmation. En matière de cessions comme d’acquisitions, l’établissement public foncier d’Île-de-France (EPFIF) ne subit pas de conséquences immédiates compte tenu de son cycle d’achats et de ventes. Il connaît en 2023 une stabilisation du fort niveau d’activité de l’année précédente. Promoteurs, bailleurs sociaux et aménageurs ont acquis du foncier pour produire 4000 logements dont 40% de logements sociaux.

Rareté du foncier et perspectives de sortie de crise

« C’est une crise de la demande solvable dans le neuf et dans l’ancien. Mais il y a encore des perspectives favorables pour la primo accession, dans des zones moins tendues. L’évolution des prêts à taux zéro peut arranger les choses. Et la machine peut alors repartir pour les primo-accédants » espère Gilles Bouvelot. Les prix commencent à baisser et aujourd’hui les propriétaires préfèrent garder leurs biens. Ainsi le phénomène de la rareté du foncier se met en place. « La rétention est assez forte, souligne Aude Debreil. Par ailleurs, CDC habitat déploie un plan de soutien au secteur, avec le rachat 17 000 logements destinés à l’accession qui ne trouvaient pas preneur. 12 000 d’entre eux seront des logements intermédiaires et 5 000 de l’habitat social, dans les zones tendues. Et 50% de ce plan de soutien est déployé en Île-de-France ».

Nouvelles opportunités et modes de production innovants

Pour CDC Habitat le volume d’investissement a baissé en 2023. «  La commercialisation est très compliquée. Il faut ré-insuffler de la confiance, mutualiser cette crise par un travail en commun et utiliser des modes de production innovants hors site » détaille Aude Debreil. C’est ainsi que le bailleur social a commencé un partenariat avec la Banque des territoires et le groupe Frey pour la production d’opérations mixtes dans le cadre de mutation de zones commerciales. Avec la production de moins de logements neufs que de réhabilitation, la question de la crise de l’offre peut se poser. « Un tiers de la production de logements sociaux sur du foncier de l’EPF est réalisé sur du bâti », précise Gilles Bouvelot.
« Il y a un risque d’une crise de l’offre qui pourrait être dramatique. Car la capacité à réguler le marché ( thème du groupe de travail de l’ORF en cours) s’avère compliquée. Il faut réintroduire de la planification de même type que pour une ZAC. La fiscalité immobilière est aussi à revoir » dit avec conviction Laurent Girometti,. Et du côté de l’EPFIF, les perspectives sont bonnes malgré tout. «  La machine n’est pas arrêtée. Mais il faut être vigilant sur les acquisitions. L’EPFIF veut purger tous les recours, pour que les promoteurs interviennent ensuite, même s’ils n’ont pas intérêt à que cela aille très vite. En effet, le recours permet de ralentir le processus…  » remarque Gilles Bouvelot.

Post-scriptum

Cartoviz foncier : une cartographie interactive sur les marchés fonciers franciliens

Développé par l’Institut Paris Region en lien avec l’ORF, Cartoviz foncier est une application cartographique qui met à disposition des données de référence sur les marchés fonciers. En cliquant sur une commune de son choix, 3 types de données sont ainsi accessibles : les marchés fonciers, la construction de logements et le « ressort foncier » de la construction qui fait apparaître notamment l’origine des terrains, aménagés ou non. Sur toutes les catégories de données déclinées les chiffres sont aussi délivrés à l’échelle de l’intercommunalité et de la région Île-de-France. Les dynamiques de marché foncier sont aussi accessibles sur 10 ans et avec le montant et la superficie du foncier concerné.

Lien pour accéder à l’application : https://cartoviz2.institutparisregion.fr/id_appli=orf&map=@2.072329766865561,49.10387750553893,11z